Acte manqué dans la cure : quand il y a encore quelque chose à dire.
Paris, le 26 Juin 2020.
Monsieur H est un psychanalysant qui vient trois fois par semaine à ma consultation.
Souvent, le psychanalysant oubli ses effets personnels au cabinet, à la suite de ses séances : clefs, téléphone portable, lunettes de vue, etc. Rapidement, quelques secondes après avoir quitté le cabinet, il se rend compte de son oubli ou plutôt, de son acte manqué, et fait marche arrière pour venir récupérer cet objet laissé là.
Monsieur H est loin d'être le seul à « oublier » ses effets personnels, bien d'autres patients ou psychanalysants agissent ainsi. Cela se passe également en dehors de la clinique, puisque ces petites manifestations sont quotidiennes dans la vie de chaque être. Mais dans le cadre de la cure, comment le clinicien doit-il opérer avec cet élément?
Sigmund Freud nous en apprend un peu plus dans Psychopathologie de la vie quotidienne. Il affirme que l'oubli d'un objet chez le médecin est à considérer comme une action symptomatique traduisant le désir inconscient du patient de revenir (p. 308)1.
Fernando de Amorim dans son enseignement reprend cette idée pour l'appliquer en tant que technique dans la clinique : si le patient ou le psychanalysant oubli un objet au sein de notre consultation, laissons-nous guider en tant que clinicien par l'inconscient de la personne qui vient nous rendre visite, et proposons lui de faire à nouveau une séance, afin d'interpréter cet acte manqué.
Le Moi de l'être peut certes le pousser à refuser notre proposition de séance supplémentaire. Mais celui qui occupe la position de psychothérapeute ou de psychanalyste vis-à-vis du patient n'aura pas fait la sourde oreille face à cette manifestation psychique et aura rempli sa tâche. Si le Moi du patient ne souhaite pas en faire tout autant, cela le regarde.
La question est que Monsieur H accepte toujours de faire une séance supplémentaire à la suite de ces actes manqués. Il joue le jeu de la cure, et fait preuve d'un désir de savoir beau à voir. Le psychanalysant ne lâche rien et c'est justement lors de ses séances supplémentaires que Monsieur H, dans son association libre, dit des choses tout à fait merveilleuses, allant dans le sens d'une avancée de sa cure.
1 FREUD, S. (1901), « Psychopathologie de la vie quotidienne », in Oeuvres Complètes, VOL. V., Paris, Editio PUF, 2012, p. 308 .